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DÉCEMBRE 1763

ambassadeur, ayant voulu interposer son autorité, M. d’Éon n’en a tenu compte ; ce qui l’a obligé à porter des plaintes à la cour de France. Depuis, M. d’Éon a passé dans la cité de Londres, et, malgré toutes les réclamations du ministère, il est inviolable. Le roi d’Angleterre ne peut le faire enlever de son asile. Il était important de conter une anecdote toute politique, mais qui regarde un homme de lettres.

22. — M. Marmontel a prononcé aujourd’hui son discours de réception à l’Académie Française. Malgré son ton pédantesque, et qui semblait exiger des applaudissemens, il n’en a reçu que quelques-uns en certains endroits. Il a fait valoir, comme il devait, la nécessité indispensable des hommes de lettres pour transmettre à la postérité les belles actions. Il a détaillé, d’une manière vraie et naturelle, les embarras, les inquiétudes d’un auteur isolé et qui ne trouve point dans ses amis les ressources dont il aurait besoin pour être éclairé dans la carrière qu’il parcourt. Ces deux morceaux, et une très-belle image sur l’Académie des Belles-Lettres, sauveront de l’oubli ce discours consacré, comme tous les autres, à la fadeur et à l’adulation. M. Bignon, directeur, a répondu d’une façon maigre et d’un ton rauque. Ensuite, M. de Marmontel a repris la parole, et a lu une épître en vers de dix syllabes, sur la force et la faiblesse de l’esprit humain. Ce morceau de poésie, qui n’a rien de neuf que la difficulté vaincue à l’égard de plusieurs systèmes de physique, rendus d’une manière assez pittoresque, n’est que d’un très-faible mérite, après les Discours Philosophiques de M. de Voltaire.

23. — M. l’abbé de Marsy vient de mourir. Il avait été Jésuite, et s’était distingué alors par plusieurs poésies