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MÉMOIRES SECRETS

On lit dans la même relation le détail d’un placard séditieux, affiché à Grenoble, dont voici les paroles :


Ô France ! ô peuple esclave et servile !
en méprisant les lois
on t’arrache tes biens
pour t’en former des chaînes
le souffrîras-tu,
peuple assemblé ?

25. — M. Marmontel a été élu de l’Académie Française avant-hier. Il avait essuyé depuis long-temps plusieurs refus. L’extrême licence avec laquelle il avait parlé d’un grand seigneur[1] au souper d’une actrice, et la bassesse avec laquelle il avait désavoué ensuite cette satire, contre-balançaient ses talens littéraires. Son ennemi a eu la générosité de finir par le mépriser.

26. — Mademoiselle Mazarelli, cette fameuse courtisane connue par ses aventures et par son procès, vivait depuis quelque temps avec M. de Montcrif. Elle a puisé dans le sein de cet académicien un goût pour la belle littérature. Elle s’est évertuée en conséquence. Elle avait concouru pour le prix de l’Académie, et son discours paraît imprimé. Il est sans doute très-bon pour une femme de cette espèce ; mais son Éloge de Sully est d’un pinceau mort et sans vigueur. Quoiqu’il y ait apparence que son Anacréon y ait mis la main, on n’y retrouve aucun trait mâle qui caractérise le génie nécessaire pour une production de cette espèce. Il est vrai que M. de Montcrif, plus délicat que nerveux, n’a jamais que sacrifié aux grâces.

27. — On répand un bon mot du roi, que Sa Majesté peut avoir dit de très-bonne foi, mais qu’a relevé la ma-

  1. Le duc d’Aumont. — R.