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AOÛT 1763

près la vingtième partie du royaume ; que les morts se montent à quatre cent mille hommes ; que sur huit morts il y en a au moins un qui meurt de la petite vérole ; qu’il y en a donc cinquante mille qui sont enlevés par cette maladie ; et que l’avantage de l’inoculation étant de trois cents contre un, elle conserverait quarante-neuf mille huit cent trente-quatre personnes à l’État.

Je n’ai pas commis le crime, Monsieur, de me croire criminel, pour avoir employé tous les moyens qui pourraient rendre ce Mémoire odieux et méprisable. Je ne redoutais pas même d’être cité au parlement. S’il m’avait condamné, en me plaignant de l’abus des lois, j’eusse adoré leur justice. Je n’ai que la douleur de lui être dérobé ; c’est le seul sentiment qui mêle quelque amertume à l’obéissance que je dois au roi.

J’ai rassuré le pauvre homme que vous m’avez envoyé : il me croyait apparemment coupable. D’ailleurs, comme il avait peut-être ses affaires et moi les miennes, et qu’enfin je n’aime pas les complimens, pour le tranquilliser, je lui ai dit que j’allais vous écrire, et lui ai donné ma parole que nous partirions cette nuit ensemble.


10. — Lettre d’un philosophe à un autre philosophe de ses amis[1].

Je m’affligerais avec tout autre, M. le comte, de ce qui vous arrive ; mais j’en ris avec vous. La prison ne vous inquiète pas : votre âme est toujours égale et tranquille, à Metz comme à Paris. Le public malin n’en croit rien ; il se moque de vous, et prétend que vos lettres à M. de Saint-Florentin, à M. de Bissy et à M. de Noailles sont de la mauvaise plaisanterie, sans goût, sans style, et

  1. Cette lettre est attribuée au duc de Pequigny. — R.