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AOUT 1762

France : Nécessité d’y anéantir la religion chrétienne : Nécessité d’empêcher M. le Dauphin. On prétend que ce libelle affreux est fait en faveur des Jésuites ; que de la première nécessité on en veut inférer la nécessité des deux autres. Quoi qu’il en soit, personne ne dit avoir lu ces horreurs, bien que tout le monde en parle. On présume avec assez de raison que ce livre n’existe que par son titre. C’est un canevas épouvantable, qu’un monstre fanatique aura répandu dans le public pour le donner à remplir à qui l’osera[1].

20. — Il paraît que le procès de Rousseau reste là. On prétend qu’Abraham Chaumeix est auteur du réquisitoire de M. l’avocat général[2] ; il est aussi plat, aussi dénué de bon sens que son auteur.

25. — Cette après-midi l’Académie Française a tenu sa séance publique, peu brillante aujourd’hui, et l’on a vu, au grand étonnement de tous les spectateurs, deux filles, mademoiselle Mazarelli et sa compagne, dans la loge du Directeur Moncrif. Depuis quand le temple des Muses devient-il celui des courtisanes ?

M. Thomas a remporté le prix de poésie. C’est pour la quatrième fois qu’il est couronné. Son Ode est intitulée, le Temps. C’est du galimatias. Il y a deux strophes de sentiment qui méritent d’être distinguées, mais encore sont-elles gâtées par l’enflure du style.

Il avait fait une seconde Ode[3] qui se trouve avoir balancé le prix. Il y a plus de philosophie, et elle est moins bouffie. M. d’Alembert a relevé tout cela par sa déclamation magistrale et pédantesque. Il a également

  1. V. ier et 8 octobre 1762. — R.
  2. V. 9. juin 1762. — R.
  3. Sur les devoirs de la société. — R.