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— Hermine, répondit la jeune fille.

— Hermine ! répéta M. St.-Aubin, en s’éloignant ; mais non, non, c’est impossible. Oh ! la Providence ne peut ainsi se jouer du cœur des hommes.

Il revint auprès de la jeune fille. — Mais où donc se trouve-t-il que je le voie et lui parle ?

— Le voici qui entre, dit Hermine.

Effectivement, en entrant, Jean Renousse reconnut M. St.-Aubin.

— M. St. Aubin !

— Jean Renousse !

Telles furent les seules paroles qu’ils purent dire, et ils tombèrent dans les bras l’un de l’autre.

Alors Jean Renousse poussa la jeune fille vers M. St.-Aubin en s’écriant : « Chère enfant, embrasse ton père. » En entendant ces paroles, celui-ci sentit comme un océan de joie et de bonheur, depuis longtems inconnu, l’inonder tout entier ; et chancelant comme un homme ivre, il alla s’affaisser dans un fauteuil qu’on lui présenta. Mais rarement les secousses de la joie inespérée, qu’on éprouve soudainement, produisent de fâcheux résultats ; aussi, grâce aux soins qu’on lui prodigua, fut-il bientôt remis.

En ouvrant les yeux, il vit tout autour de lui les figures de ces bons sauvages inondées de larmes, et il sentit sur ses joues les baisers brûlants de son enfant. Enfin aux pleurs succédèrent la joie et le bonheur. Toute la petite tribu qui avait adopté Hermine comme une des leurs, qui lui avait montré toute espèce de bontés et de prévenances, fut invitée à une grande fête. Après le repas, M. St.-Aubin distribua à chacun des hommes et des femmes de riches présents ; de sorte que, outre la satisfaction d’avoir fait une bonne action, ils partirent enchantés de la munificence de leur hôte. Jean Renousse et sa femme ne purent se décider à abandonner leur enfant. Désormais, d’ailleurs, leur place était marquée pour toujours à côté de M. St.-Aubin et d’Hermine.