Jean Richepin qui est Algérien, la comtesse de Noailles, roumaine et Moréas qui est né à Athènes, on doit reconnaître que la terre gréco-latine est une féconde génitrice de poètes.
Nourrice des belles formes et des belles pensées, cette terre produit des enfants robustes, dont la santé est rebelle aux épidémies intellectuelles. Nous avons résisté au débordement réaliste et élevé contre le laid notre protestation orphique. Plus tard, le brouillard symboliste qui couvrait le Nord d’une nuit profonde a été refoulé par la lumière pure qui baigne à la fois les ruines de l’Acropole et les bords de la Méditerranée.
De l’art décadent nous avons rejeté le principe : le symbole et les innovations formelles : le vers libre. La métrique traditionnelle n’a cessé d’être en honneur. A peine quelques-uns ont-ils pratiqué le vers libéré. Mais tradition n’a pas été, chez nous, synonyme d’immobilité et de stagnation. L’alexandrin parnassien a été assoupli, forgé derechef de main d’ouvrier sur l’enclume d’Héphaistos. Nos partitions poétiques se sont enrichies de rythmes nouveaux. C’est ainsi que l’un des nôtres, M. Lionel des Rieux, a parfois réussi à ravir toute vive, et à transporter dans la dernière enceinte de la versification française, tel un gardian de Camargue emportant en selle une fille d’Arles, cette grande et sonore strophe provençale de sept vers dans laquelle ont été écrits Calendal et Mireille.
Quelle est la raison première de notre résistance à la contamination ? C’est encore la vertu solaire dont parlait Lamartine. Au bord de la Méditerranée, mer inspiratrice de l'Odyssée, mer qui enfanta la fille d’Ouranos, mer qui porta en Phocée les Latins, nous nous plions d’instinct à la discipline d’Athènes et de Rome. Le Midi français — M. Pierre Louys le rappelait na-