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LAURIER ET SON TEMPS

breux et avait jeté les fondements du village de l’Avenir. Non content de parler, il voulut écrire, et fonda Le Défricheur, dont il avait fait un journal libéral, mais avant tout dévoué aux intérêts de la colonisation. Ses discours, ses écrits et ses exemples l’avaient rendu l’homme le plus populaire de cette région.

Lorsqu’il mourut, ce fut un deuil général ; les colons, les cultivateurs disaient qu’ils avaient perdu leur meilleur ami.

Il était difficile de remplacer un pareil homme. Laurier l’entreprit pourtant ; sa modestie ne l’empêchait pas de percevoir ce qu’il était capable de faire. Il se rendit à Arthabaska, ouvrit un bureau d’avocat et prit la direction du Défricheur. C’était le temps où la lutte entre le clergé et le parti libéral sévissait dans toute sa rigueur. Laurier entra dans la fournaise ardente de la polémique, et exprima, avec une franchise dangereuse, des opinions qui attirèrent sur son journal l’hostilité de l’évêque du diocèse, Mgr Laflèche, et du clergé en général.

Mgr Laflèche était un redoutable adversaire pour le parti libéral, qui portait depuis longtemps la responsabilité des écarts de plume et de langue des libéraux de 1848 et 1854.

Le Défricheur, condamné, perdit ses abonnés, et Laurier fut obligé d’en discontinuer la publication. Il garda longtemps un souvenir amer des rigueurs de Mgr Laflèche. Ce fut la période la plus sombre de sa vie, car dans le moment où il avait tant besoin de santé pour se faire une clientèle, il tomba malade. Il connut alors les inquiétudes, les angoisses de l’homme de cœur qui manque d’argent pour les choses les plus nécessaires.

Pendant plusieurs semaines, ses amis craignirent de le perdre ; mais il finit par recouvrer la santé, et alla s’établir à Arthabaskaville.

Pendant sa cléricature à Montréal, il avait fait la con-