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LAURIER ET SON TEMPS

Il fit, dans un langage grandiose, l’historique des dernières luttes de nos pères pour conserver le Canada à la France, et de leurs sacrifices ensuite pour la conquête de la liberté et pour la conservation de leur langue, et termina par la péroraison suivante :

« Rappelez-vous que l’histoire du Canada est en grande partie l’histoire de la France. Rappelez-vous que, dans l’histoire de la France, il y a toujours à apprendre. Les événements, qui se sont passés en France après la séparation du Canada, nous ont appris tout ce qu’il y a de vérité dans la célèbre parole de Bossuet : l’homme s’agite, Dieu le mène. Les événements qui se sont passés en France depuis la séparation du Canada nous ont appris tout ce qu’il y a d’inanité dans les projets des conquérants, les constitutions des législateurs, les conceptions des hommes d’État, ces événements nous ont aussi appris — avec une intensité que l’on n’avait peut-être éprouvée à aucune autre époque de l’histoire — qu’à chaque heure, chaque minute de notre vie, il y a toujours un devoir à accomplir, et qu’après tout, être fidèle au devoir de l’heure présente, c’est toujours la préparation la plus sûre de l’heure future. L’avenir est à Dieu seul. C’est dans cette pensée que moi, fils de la France monarchique, j’offre au ciel mes vœux les plus ardents pour la France républicaine. Puisse-t-elle se développer avec sécurité dans la voie de la liberté et du progrès !

« Messieurs, je n’ai plus que quelques jours à passer sur cette terre de France, qui fut la patrie de mes aïeux. Quand je m’éloignerai de ses rives bénies, quand, monté sur le navire qui m’emportera, je verrai graduellement les côtes s’effacer et disparaître à l’horizon, c’est de toute mon âme, c’est du plus profond de mon cœur que je dirai et que je répéterai : Dieu protège la France ! »

M. Henri Moreau parle, dans les termes suivants, de l’effet produit par ce discours :

« Sous l’empire d’une profonde émotion, l’auditoire