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LA GUERRE DE SAINT-CASTIN

La Nouvelle-Angleterre n’était guère en état de leur résister. L’avènement de Guillaume d’Orange, en Angleterre, avait été dans les colonies le signal d’une révolution qui, non seulement mettait aux prises tenants des Stuarts et partisans d’Orange, mais dressait contre les gouvernants les coloniaux exaspérés par le régime des années précédentes.

Leurs griefs remontaient à 1684, année où Charles II avait substitué aux chartes coloniales le pouvoir personnel. Andros et Dongan étaient devenus les instruments du roi.

La garnison de Pemquid se mutina, l’émeute gronda dans Boston 25. Vingt compagnies de volontaires s’y concentrèrent. Douze cents hommes, à Charlestown, attendaient le signal.

Les colons dressèrent la liste de leurs revendications dans un document solennel. Au fond, ils en avaient surtout contre la tolérance des gouvernants à l’égard des catholiques. Leur réquisitoire vibrait d’imprécations contre la popery et les papists. Ils s’élevaient aussi contre la dictature d’Andros qui avait gouverné et imposé des taxes sans consulter le conseil élu. On lui reprochait ses exigences à l’égard des occupants de terres forcés de se pourvoir de titres réguliers ou évincés au profit de personnes disposées à offrir davantage. Que ne relevait-on pas contre lui ? On le disait papiste ; on l’accusait de favoritisme dans le choix des fonctionnaires et on lui faisait un grief mortel d’avoir imposé, dans les tribunaux, le serment sur la Bible à la place du serment à main levée. Enfin, on le critiquait vertement d’avoir provoqué la guerre de Saint-Castin et, illogiquement, d’avoir libéré les prisonniers de Blackman. Beaucoup, perdant la tête, l’accusaient d’avoir aidé les sauvages catholiques pour la destruction des établissements protestants de la frontière. Un chroniqueur écrit même cette énormité : « Andros est, de quelque façon, d’origine française. Il favorise donc les intérêts français » 26. « Nous sommes devenus esclaves, proclamait le fameux document. Nous réclamons un gouvernement sorti de la voix du peuple » 27.

Andros, déposé, eut pour successeur l’ancien gouverneur Bradstreet rétabli dans ses fonctions.

Bradstreet, se flattant de conclure la paix avec les Indiens, leur envoya des plénipotentiaires et des cadeaux. Moyennant une forte somme, un sachem abénaquis prê-