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SAINT-CASTIN CHEZ LES SAUVAGES

Nouvelle-Angleterre, qui n’y restèrent pas davantage 22, appelés ailleurs par la guerre du roi Philippe. C’est alors, apparemment, que Saint-Castin s’en empara. Il demeurait dans le Vieux-Logis et les bâtisses du fort lui servaient d’entrepôts. Il ne jouissait pas d’une possession indiscutée. Les Anglais lui prirent ce poste à diverses reprises, ou du moins le saccagèrent.


Pentagoët s’élevait au fond de la baie du même nom, à l’embouchure de la rivière également nommée ainsi par les Français. Rappelons que, pour les Anglais, Pentagoët, c’est Ponobscot. Cette région se trouve aujourd’hui dans le Maine, et Pentagoët porte le nom de notre héros, transformé en Castine. À l’époque de notre histoire, le village se trouvait à quelques milles de la frontière entre l’Acadie et la Nouvelle-Angleterre, frontière que les Français rejetaient au-delà de la Kennébec, et que les Anglais fixaient à la rivière Sainte-Croix (quand ils se sentaient forcément généreux) mais plus souvent à la rive gauche de la Pentagoët. La région formait une marche sans cesse disputée par les armes et par la diplomatie. Depuis 1654, une commission siégeait à Londres et à Paris (quand le cœur lui en disait) en vue de départager les deux puissances. Elle siégea si longtemps que son rapport parut un siècle plus tard, alors que les armes avaient depuis longtemps réglé la question.

Incapables de défendre Pentagoët quand ils l’avaient pris, les Anglais établirent, à proximité de la Kennébec, le fort de Pemquid qui, à son tour, fut l’objet de luttes furieuses.

Le lieu ne manquait pas d’agrément. Dans l’embouchure en delta de la Pentagoët, des navires de 300 tonneaux pénétraient aisément. Puis, s’étalait la vaste baie aux îles nombreuses, dont la plus considérable était celle des Monts-Déserts qu’on laissait à droite en entrant. Des terres fertiles entouraient le poste et, dans la forêt, s’apercevaient des pins de soixante pieds dont tous les navigateurs auraient voulu faire des mâts. Le gibier y foisonnait. Ours, orignaux, castors, entre autres animaux, fournissaient abondamment les indigènes de pelleteries et de viande 23.

À cause de l’état de guerre perpétuel, la colonisation ne s’y implantait pas. Les sauvages y régnèrent sans entraves jusqu’à une époque avancée.