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JOSEPH D’ABBADIE DE SAINT-CASTIN

Quatre-vingt-dix canots parurent devant Georgetown. Le commandant Penhallow perdit la tête, mais les assaillants se bornèrent à lui remettre une lettre due sans doute à la plume de Sébastien Rasles sommant Shute de quitter dans trois semaines les terres occupées illégalement, à défaut de quoi ils brûleraient toutes les maisons.

Les sauvages partis, Shute dépêcha des renforts à Georgetown, sous le commandement du colonel Thaxter et du lieutenant-colonel Gofte. Après quoi, il invita les Indiens à une nouvelle conférence. Les indigènes s’en moquèrent.

On était en 1720. Attribuant leurs déboires au père Rasles, les Anglais chargèrent le shérif du comté d’York, accompagné de 150 hommes, de s’emparer du prêtre si gênant. Ce geste, ni honorable ni courageux, n’eut pas de suite, car les sauvages surent défendre leur missionnaire. Mais les Anglais devaient réussir dans une entreprise semblable, quatre ans plus tard 1.


— II —


L’enlèvement de Joseph d’Abbadie. — Le contingent envoyé de Pentagoët à Georgetown avait pour commandant Joseph d’Abbadie, qui prit le nom de Saint-Castin à la mort de son frère.

Plusieurs enfants de Jean-Vincent de Saint-Castin étaient restés en Acadie. Deux de ses fils, au moins, demeuraient toujours à Pentagoët, puisque, le 10 novembre 1720, le marquis de Vaudreuil écrivait au conseil de la Marine :

« Le sieur de St-Castin qui avoit la paye de Lieutenant surnuméraire étant mort, il supplie de procurer cette paye à ses deux frères qui demeurent à Pentagouet et ausquels elle pourra estre partagée par moitié. Comme ils sont de la nation abénakise du costé de leur mère, cette gratification annuelle servira beaucoup à augmenter le zèle avec lequel ils entretiennent les sauvages de cette nation dans les interests des françois. »

Ainsi la famille de Saint-Castin continuait-elle à défendre les intérêts de la France en Acadie. Si les renseignements font parfois défaut sur l’existence du cadet, on sait du moins que l’aîné, Joseph, se dévoua entièrement à cette tâche.

Dès la mort de Bernard-Anselme, les Pentagoëts l’avaient élu chef suprême, titre que n’avait pas eu son frère. Mais Joseph avait toujours vécu dans la tribu.