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LE BARON DE SAINT CASTIN

que et dévoué, Rasles défendait les droits des indigènes et représentait la France dans ce coin.

Après le traité d’Utrecht, les Anglais entreprirent de fortifier la frontière naturelle de la Kennébec. Des forts, bientôt entourés de colons, s’élevèrent à Brunswick, Thomaston et en face de l’île des Cygnes. Par malheur, les Anglais s’emparaient des terres sans la permission des sauvages.

La colère grondait dans les tribus, d’autant plus que les colons anglais, selon l’habitude de leur race, traitaient les indigènes avec un souverain mépris. Cependant, les Indiens eurent d’abord recours à la conciliation. Le 9 août 1717, un congrès réunit à Arrowsic leurs délégués et Samuel Shute, successeur de Dudley au gouvernement de Boston depuis l’année précédente. Shute prit les choses de très haut, bouscula le protocole indigène et, quand les plénipotentiaires des tribus eurent protesté contre l’érection des forts, il répondit avec brutalité qu’il érigerait des fortifications où bon lui semblerait. Les sauvages quittèrent la réunion incontinent.

Sur quoi, le père Rasles demanda à Shute, par écrit, l’origine du titre de propriété que réclamaient les Anglais. Le gouverneur ne répondit pas.

Les sauvages redoutaient la guerre à tel point que, le lendemain ils envoyèrent de nouveaux délégués auprès de Shute. Un accord intervint, aux termes duquel les Anglais pouvaient prendre possession de certaines terres à condition d’établir des postes de traite et un atelier d’armurerie près des établissements indigènes.

Une correspondance acerbe s’ensuivit entre le père Rasles, et le gouverneur Shute qui oubliait ses promesses. Un nouveau congrès eut lieu à Georgetown mais sans résultat ; il ne restait plus que le recours aux armes. Les sauvages tombèrent sur les établissements anglais de la Kennébec.

Les indigènes représentaient au gouverneur de la Nouvelle-France qu’ils avaient mérité la protection de la France. Le traité d’Utrecht plaçait les Iroquois sous la tutelle des Anglais, mais ne mentionnait pas les tribus amies de la France. En conséquence, Vaudreuil envoya au secours des Abénaquis 250 sauvages de Saint-François, Lorette, Bécancour et Caughnawaga, sous le commandement de Repentigny de Croisille.