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CHAPITRE IX


JOSEPH D’ABBADIE DE SAINT-CASTIN


— I —


Les Pentagoëts reprennent les armes. — Depuis le traité d’Utrecht, la France consolidait fiévreusement le reste de ses possessions acadiennes ; elle élevait des fortifications considérables à Louisbourg ; elle envoyait dans la région de Port-Royal des missionnaires chargés d’entretenir le culte de la mère-patrie dans le cœur des Acadiens et de les attirer au Cap-Breton. Mais les Anglais, en dépit du traité, leur refusaient la permission d’emporter leurs biens.

À la vérité, il aurait suffi d’un peu d’audace pour reprendre Port-Royal. En 1720 encore, il ne s’y trouvait qu’une douzaine de familles anglaises ; les fortifications tombaient en ruines ; la garnison restait réduite à l’extrême. « Les colons acadiens en auraient eu facilement raison », affirme Sylvester (III, 170). Les Français n’y songeaient pas, oubliant que, les Anglais ayant souvent violé l’état de paix, on n’avait pas à se gêner avec eux.

L’influence française persistait dans les tribus abénaquises de la frontière qui gardaient leurs missionnaires et ignoraient le traité d’Utrecht : elles soutenaient toujours que ni la France ni l’Angleterre ne pouvaient disposer de leurs territoires. En 1718, elles écrivaient au gouverneur de Boston que ni les Anglais ni les Français n’avaient conquis leur pays et qu’elles-mêmes ne l’avaient ni donné ni vendu. Les Pentagoëts sur la rivière du même nom, les Sokokis sur la Saco, les Norridgewocks sur la Kennébec près des chutes Ticonic conservaient leur attachement envers la France, malgré la trêve conclue avec les Anglais à Portsmouth.

La mission de Norridgewock avait été établie par le père Sébastien Rasles, vers 1695, et elle portait le nom de Narantsouak, village prospère et bien fortifié. Énergi-