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BERNARD-ANSELME DE SAINT-CASTIN
Anglais, qui ne tachent à envahir ce continent, que pour les réduire eux-mêmes dans l’esclavage, en les privant, s’ils venaient à bout de nous, des secours que nous leur donnons, comme sont les vestemens, la poudre, le plomb et les armes, les faisant ensuitte attaquer par d’autres nations pour les détruire entièrement, ce qui doit leur faire connoistre que leur propre conservation et la seureté de leurs familles dépend de la véritable et sincère union d’esprit et de religion qu’ils conserveront avec nous et qu’il est à propos qu’ils conservent tant que la guerre durera entre les Princes en Europe.
Comme il n’y a nullement à doutter que le Gouverneur Anglois, qui sera à Port Royal, fera tous ses efforts, soit par promesses ou par menaces, pour gaigner ou intimider les sauvages de l’Acadie affin de les attirer à son party, se servant pour cela des habitans mesme du Port Royal, pour leur porter des marchandises dans la proffondeur des bois, par ce que, estans connus des Sauvages, ils auront plus de facilité à avoir accès chez eux.
Nous, pour prévenir les suittes dangereuses qu’un pareil commerce pourrait produire, nous enjoignons au sieur baron de St-Castin de faire piller par les François et sauvages qui seront avec luy générallement tous les Anglois qui porteront de la marchandise dans la proffondeur des bois et dans les lieux de traitte, et, semblablement, les François du Port Royal et autres lieux de l’Accadie qui n’auront pas un ordre ou congé par escrit, signé de nous, faisant séparer sur l’heure les marchandises à tous les sauvages et françois qui seront avec luy et mesme s’il est possible à tous les villages sauvages de l’Accadie, et en cas de résistance de la part des Anglois et François faire main basse sur eux, espargnant néanmoins le sang tant qu’il sera possible et se contentant sy lesdits François ou Anglois ne se mettent point en deffense de les arrester prisonniers ou de nous les renvoyer, icy, d’abord que la saison le poura permettre.
Le sieur baron de St-Castin nous ayant donné sa parolle d’honneur de faire faire par les sauvages le plus de partis qu’il luy sera possible contre les Anglois, qui sont au Port Royal et contre ceux du gouvernement de Boston, et mesme, d’y aller en personne, nous luy enjoignons, sy tost qu’il y aura quelques nouvelles de conséquence de nous le faire savoir par des canots qu’il nous despeschera exprès, lesquels canots serviront ensuittes à reporter aux villages du bord de la mer les présens que Sa Majesté voudra bien leur faire et sy le sieur de St-Castin a nouvelle certaine que les ennemis soient partis pour venir en ce pays, nous lui enjoignons, en ce cas, de venir luy mesme et de nous amenner avec luy le plus de sauvages qu’il luy sera possible.
La manière obligeante avec laquelle le Révérend Père de la Chasse et tous les missionnaires qui ont esté à l’Accadie nous ont toujours escrit au sujet du sieur de St-Castin nous faisant connoistre la bonne intelleigence qui est entre eux, il est de la dernière conséquence que le sieur de St-Castin donne tous ses soins pour les continuer, agissant mesme de concert avec ces missionnaires et prenant leurs avis lorsque l’occasion s’en présentera sur ce qui regardera le plus grand bien du service de Sa