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IBERVILLE ET SAINT-CASTIN
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quelques instants, sans que le silence eût été troublé, tous les Indiens étaient morts, Haverhill était vengé.

Ramassant fusils et provisions les trois Anglais montèrent dans un canot. Ils allaient partir quand Ilannah débarqua, afin de réparer un oubli à l’entendre, malgré les supplications de ses compagnons. Elle revint bientôt, brandissant douze chevelures.

Hannah Dustin devint à juste titre l’héroïne d’Harerhill et le colonel Nicholson, gouverneur du Maryland, lui envoya 50 livres en signe d’admiration 29.

Les Abénaquis eurent, vers le même temps, l’occasion de satisfaire une vengeance qui attendait depuis vingt ans. Waldron avait payé de sa vie la trahison de 1676 à Cocheco. Restait le major Frost, son complice. Les sauvages n’oubliaient pas, ils n’oubliaient jamais.

Le 4 juillet 1697, un dimanche, Frost se rendait à l’église de Quampegan (South-Berwick). À un mille de sa maison barricadée, comme il s’engageait dans un sentier bordé d’un grand rocher, trois coups de feu éclatèrent. Frost et ses compagnons, Dennis Downing et Mme Heard, s’écroulèrent sur le sol. Les deux premiers avaient été tués sur le coup ; la dernière, bien que grièvement blessée, se traîna jusqu’à la prochaine habitation.

Les colons firent des funérailles solennelles à Frost. Mais la haine des Indiens n’était pas assouvie. Pendant la nuit, ils déterrèrent le cadavre, puis l’empalèrent sur un long poteau au haut d’une colline 30.


À la tête de 500 hommes aguerris, le major March se mit en campagne. Dans tous les établissements, la milice se tint sous les armes. Sauf près de Casco, où March réussit à engager un combat vite terminé par la retraite des Peaux-Rouges, les Anglais s’épuisèrent en d’inutiles marches et contre-marches. Fidèles à leurs tactiques habituelles, divisés en petits groupes, les sauvages avaient repris la guerre d’embûches. On les signalait à de nombreux endroits à la fois ; partout ils tuaient des colons, brûlaient des habitations, mais jamais où se trouvaient des troupes 31. La terreur régnait dans ce dangereux pays frontalier. Bien que la saison des récoltes fût venue, on n’osait se risquer dans les champs qu’en groupes fortement armés.