né chez sa Divine, qui jamais ne voulut se frotter au commun des colons. Il ne protégera plus les coquins.
Le vieux Le Moyne n’avait jamais aimé M. de Frontenac. Pierre le savait. Il avait soutenu son père dans sa lutte contre le gouverneur, avec les jésuites et Duchesneau. Mais c’était par solidarité de famille. Allait-il entrer dans sa querelle contre le grand explorateur, querelle de marchand furieux d’une créance qu’on ne lui règle pas ?
Le lendemain, d’Iberville allait chez son oncle Jacques Le Ber, rendre compte d’affaires traitées à Paris. Le bonhomme aunait du drap, tout en causant paisiblement avec son neveu, quand la porte s’ouvrit en coup de vent. Robert Cavelier entra, une lueur de défi dans le regard. De surprise, M. Le Ber en laissa tomber son aune. Sans lui donner le temps de se resaisir, La Salle dit, d’une voix glaciale :
— Le navire arrivé hier repart avant les glaces. Je m’y embarque. Là-bas, je mettrai ordre à mes affaires. Je verrai ensuite à vous régler votre créance. Je tenais à vous prévenir.
Il salue, sort. M. Le Ber, recouvrant la parole, l’invective de la belle manière. La fureur le secoue tout entier. Pierre en profite pour se retirer et, à grandes enjambées, rejoindre La Salle.