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tsar lui demanda d’une voix étonnée : « Avez-vous donc jamais causé avec Son Altesse Impériale le grand-duc héritier ? » Le ministre ayant répondu par l’affirmative, l’empereur dit amèrement : « Vous ne vous êtes donc pas aperçu que le tsarevitch est un crétin ? »

Le tsar Alexandre préférait de beaucoup son fils cadet, le grand-duc Georges. On racontait qu’il songeait à écarter l’aîné du trône pour y faire monter Georges.

Afin de secouer la torpeur du tsarevitch, Alexandre le fit entrer dans un régiment. Nicholas prit goût à la vie dans les cercles d’officiers et bientôt l’on sut qu’il aimait la danseuse Kchesinskaia. Il n’y avait pas moyen de lui faire entendre raison.

Pour couper court à l’aventure, le tsar envoya son fils faire le tour du monde à bord d’un cuirassé où nulle femme n’était admise. Le grand-duc Georges l’accompagnait.

Un jour, ennuyés par le long voyage, les officiers du navire de guerre organisèrent des jeux sur le pont. Des lutteurs et des boxeurs amateurs excitèrent l’admiration de tous. Le grand-duc Georges dit tout à coup à son frère : « Nicki, essayons-nous nos forces ? » Les deux princes ôtèrent leur veste. Les deux corps s’étreignirent. Nicholas y allait avec une fougue, devant laquelle Georges rompait, le sourire aux lèvres. Les yeux injectés de sang, le tsarevitch allait clouer son frère sur le pont, selon les règles du jeu, quand un cri d’épouvante s’éleva. Les deux frères s’étaient trop rapprochés de l’escalier et, les bras étendus, Georges tomba à pic dans le trou béant, pour aller heurter le fer du premier pont. Les officiers se précipitèrent. Nicholas regar-