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d’obus à destination d’Archangel. Au jour prévu, le journal Shipping News annonçait que le Phœbus avait pris feu en mer.

Le plan réussissait. À partir de ce moment, il ne partit pas un transport de munitions qui n’eût, à bord, les terribles engins. Tous ne périssaient pas, parce qu’on avait soin de placer les tubes de plomb loin des munitions. Quand un incendie se déclarait, le commandant noyait sa dangereuse cargaison, afin de sauver son navire. Le but de Rintelen était atteint : les obus ne pouvaient plus servir aux Alliés.

Ce succès ne suffisait pas à notre homme. Par l’entremise du comte Ignatieff, attaché militaire à l’ambassade parisienne de la Russie, la maison E. V. Gibbons importait des vins de France. À la suite de quoi, Ignatieff recommanda cette excellente maison à l’agent de la Russie à New-York. Si bien que nos commerçants obtinrent d’importantes commandes pour la fourniture à l’armée russe de viandes en conserve, de selles, de brides, de mules, de chevaux, de chaussures, de sous-vêtements, de gants et de munitions. Les contrats signés, la maison les escompta à la banque où elle obtint de la sorte trois millions de dollars. Un navire fut chargé. Mais il emportait, outre la marchandise, trente détonateurs. Il ne manqua pas de brûler en mer. Moyennant finances, l’agent russe obtint que E. V. Gibbons, Inc. remplace la marchandise. Chargée sur des barques qui devaient la transporter aux navires, elle coula malheureusement dans le port.

Dans le même temps, Rintelen créait des succursales de sa société d’incendiaires dans presque tous les ports américains. Mais il dut user de précautions,