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Mathilde laissa tomber la lettre avec un gémissement. Ses yeux, sans larmes, regardaient droit devant elle. De la révolte, mais aussi une résolution inébranlable pouvaient s’y lire. Ses lèvres murmuraient : « Olivier,… je ne vous rendrai jamais ma parole, moi !… Oh ! comme vous connaissez peu le cœur d’une femme qui aime ! »… Puis, la jeune fille rompit le cachet du deuxième envoi. Elle poussa une exclamation. Elle avait devant elle la tête expressive de son fiancé. Le dessin était signé Jean-Joseph Girouard. Un petit mot de sympathie lui était adressé.

La jeune fille put donc contempler à loisir les traits altérés, terriblement amaigris d’Olivier. Seuls les yeux noirs, qui dévoraient le reste de la figure, demeuraient aussi vivants que jadis. Mais qu’ils navraient Mathilde par leur expression de profonde mélancolie. Ils disaient clairement les souffrances d’une âme très noble, indomptable… Et ce que la lettre, désespérée pourtant, de son fiancé n’avait pas obtenu, cette image où se devinait une douleur immense, silencieuse, mais maîtrisée, le provoqua. Mathilde se rejeta sur l’oreiller du divan et éclata en sanglots, en sanglots longs, prolongés, qui secouaient son corps prostré. Une heure durant, elle ne put dominer cet ébranlement nerveux.