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silencieuse et lointaine. Chaque hiver, elle allait passer un mois dans la famille de sa mère, et en revenait un peu plus dégoûtée chaque fois de sa vie à la campagne. On la disait depuis deux ans amoureuse d’un officier anglais, rencontré dans un bal militaire, à Sorel. Mais la jeune fille ne faisait de confidence à personne, encore moins à son frère, dont les convictions patriotiques étaient aux antipodes de ses sentiments assez tièdes envers tout ce qui touchait à la vie française du Québec. Peu lui importait toute cette lutte pour la défense des droits des aïeux. L’Angleterre avait conquis le Canada, pourquoi lui refuser l’allégeance des âmes ? On le désirait, et même en laissant de vulgaires politiciens nous écraser un peu plus qu’il le fallait, c’était encore pour arriver plus vite à ce but… Le jour, où la jeune fille, en revenant de Montréal, avait laissé échapper sur ce sujet le fond de sa pensée, une querelle terrible avait éclaté entre elle et son frère. La grand’mère avait dû intervenir, et user de toute son autorité pour rétablir le silence, et tenter ensuite une réconciliation. Mais les blessures reçues de part et d’autre étaient de celles qui ne se guérissent jamais. Une hostilité profonde régnait entre le frère et la sœur. Ils se supportaient par considération pour l’aïeule qu’ils aimaient beaucoup tous deux. Marie Précourt avait aussi de l’affec-