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Les aventures de Perrine et de Charlot

Oh ! son père, son père adoré, comme cela lui avait paru cruel de ne plus le voir apparaître, de ne plus entendre sa voix réconfortante…

Perrine revoit maintenant sa mère. Elle se la rappelle, douloureuse et muette, durant les premiers mois qui suivirent le tragique accident. Puis, bientôt, comme ses joues se creusèrent, comme ses yeux s’agrandirent,… chaque jour davantage… Elle toussait sans cesse,… elle pleurait… Parfois elle pressait sur son cœur Charlot, puis elle aussi, Perrine, et, d’une voix faible, lente, disait : « Mes petits, mes chers petits, que je voudrais vivre, vivre pour vous… Mais je sens bien que je ne le pourrai pas… J’ai trop de chagrin, voyez-vous… Mon chagrin me tue ! » Elle joignait leurs mains, – qu’elle se souvenait clairement de tout cela, Perrine ! — et les faisait prier ce miséricordieux Jésus qui aime les petits enfants, leur cœur pur, leurs paroles simples et confiantes. « Il vous protégera, mes chéris, disait-elle, lorsque je ne serai plus là. Priez-le toujours ainsi en souvenir de moi. » Puis, la mort était venue…

Mais, par ce lumineux après-midi de mars, si Perrine ressent une telle désolation en son cœur, en se rappelant ses peines, c’est qu’un événement redouté va s’accomplir. Ses parents, Perrine n’en ignore rien, n’avaient point de fortune. Il y avait bien, — et la petite fille regarde de tous les côtés, craignant même qu’on ne lise dans sa pensée, — il y avait bien un bas de laine contenant des pièces d’or, que sa mère lui avait remis, une semaine avant sa mort… Mais Perrine devait le cacher, n’en souffler mot à personne, en user en cas de nécessité extrême ! Charlot, surtout, avait dit sa mère, Charlot encore trop petit, ne devait pas être mis dans le secret.

Donc, la pauvreté des orphelins avait ému les