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ou complexes, du cœur humain ne pouvaient guère le surprendre. Il avait vécu au plus fort de la mêlée, aux sombres jours de 1837-1838. Il savait de quelle noblesse, comme de quelle lâcheté, se montraient capables certains êtres, lorsque la vie, soudain, se dramatisait pour eux. Puis, sur la prière de Michel de lui donner quelques avis, il prit la parole, mesurant ses mots, en craignant la portée, les expliquant et les définissant sans cesse.

— Michel, conclut-il enfin, laisse-moi te tutoyer comme durant ton enfance, tu es jeune, à l’aurore de la vie. Veille bien à ne jamais duper tout à fait ni ton cœur, ni ta raison. Essaie surtout de les maintenir en accord. Ils ne parleront pas souvent la même langue. Tu le vois déjà, du reste. Tes souvenirs d’enfance montent à l’assaut de ton cœur et t’entraînent vers des sentiers que tu redoutes malgré toi. C’est ta raison, petit, qui est intervenue pour éclairer l’autre face des choses. J’aime ta prudence, qui a peur de blesser certains cœurs, mais qui a blessé le tien tout d’abord, n’est-ce pas ? Continue cette sage conduite. Les événements compliqueront ta vie, bientôt. Tu n’es pas venu pour rien, au Canada, à Montréal, y cherchant à te créer un avenir… Mais, qu’as-tu ? Ce recul…

— M. le curé, dites-moi, de grâce, sont-ce les dames Précourt qui causent sur le perron de