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L’ambition, la haine de toute force s’opposant à la vôtre, l’écrasement des gens heureux,… voilà, voilà d’excellents motifs de lutte. L’amour, pouah !

— Votre Majesté me pardonnera de ne point lui avoir obéi puisque, aussi bien, je suis malheureux, que je souffre… oh ! — et ses mains se crispèrent sur sa poitrine — que ne donnerais-je pas à celui qui aurait le pouvoir d’extirper de mon cœur ce sentiment… cet amour pour celle qui me hait !

— Assez, Rochelure, trancha la reine. Vous m’ennuyez. Vous avez d’ailleurs mauvaise grâce à vous plaindre. À minuit, Aube sera votre fiancée. Vous pourrez alors agir à votre guise sur son esprit. Vous pourrez le dominer et le terrifier, puis en faire ensuite ce que vous désirerez. En attendant, vous avez raison, il faut couper court à cette intéressante entrevue. Allons !… Je me charge du jeune seigneur. Pour le prochain galop seulement, vous m’entendez ? Je vous l’abandonne ensuite.

— Alors, si je vous priais Altesse, une fois le galop terminé, d’entraîner votre danseur vers la salle du jeu… je serai là. Fiez-vous à moi pour le reste.

— J’y consens. En route ! »

Rochelure avait vu clair, très clair. Pour la première fois, depuis longtemps, le délicieux visage de la princesse s’animait, souriait. Il se rosait aussi. Serait-ce que son cœur vibrait sous la musique des mots tendres et émus ?… Serait-ce que le blanc chevalier qui l’enveloppait de regards attentifs possédait quelque charme secret… ignoré par elle jusque là ?… Car jamais, non jamais elle ne s’était sentie aussi ravie, légère, chantante.

Et voilà que, soudain, son compagnon se penche vers elle, l’effleure presque, tandis qu’il murmure : « Princesse, ô douce princesse, je ne puis vous tromper plus longtemps… Regardez moi ?… Me reconnaissez-vous ? »

Et le jeune étranger, qui n’était autre que Jean, le