Page:Daveluy - L'incroyable histoire de Damien-sans-peur, paru dans l'Oiseau bleu, jan-fév 1924.djvu/27

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ah ! ah !… monseigneur Lucifer ! Me trouverez-vous à votre gré ?… À nous deux, maintenant !… Venez, mais venez donc, monseigneur !

On marche derrière lui. Il se retourne. La stupéfaction cloue Damien au parquet de la chambre. Il se trouve face à face avec le prince le plus beau, le plus souriant, le plus séduisant qu’il ait encore vu. De grands yeux bruns caressants, très doux, l’enveloppent, pénétrant en un instant jusqu’à son cœur douloureux.

« Qui êtes-vous ? » balbutie Damien. Il ne peut croire, vraiment, que ce soit là le terrible Lucifer.

« Damien-sans-peur, prononce une voix harmonieuse, pourquoi êtes-vous si troublé ? Portez mieux votre nom. Ignorez-vous donc que Lucifer peut devenir le plus doux des amis, si cela lui plaît ? Et il me plaît, Damien.

Damien garde le silence. Il se sent une chose si petite, si frémissante, si faible entre les mains de Lucifer.

Et la beauté de l’ange déchu le prend soudain tout entier. La lâcheté le mord au cœur. Jamais, non jamais, il se mesurera à cet esprit dont le charme l’enivre…

Le rusé Lucifer se met à rire. Il devine sa victoire, l’envoûtement qui déjà commence. L’expressive physionomie de Damien reflète une entière sujétion.

À la bonne heure, Damien, fait-il. Vous voilà devenu raisonnable. Vous verrez que je sais être bon prince, parfois. Nous allons faire tous deux la plus agréable partie de cartes qui soit… Holà ! Ici !… ordonne-t-il en se retournant. Apportez une table, des cartes, des fleurs, du vin, de l’or… beaucoup d’or !

Quatre démons s’empressent de servir le maître puis, sur un signe, disparaissent prestement.

Et voilà que Damien ne sent plus sa blessure sous l’influence diabolique qui le tient. Il engage une par-