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— Que fais-tu, Kiné ? Tu ne me gardes pas sous ta tente ? Je m’en vais. Pourquoi !

— Il y va de la vie, mon frère.

— Ah !

— Mon frère boirait-il un peu de tisane ?

— Oh ! oui. Donne, Kiné.

— Voici…

Charlot but à longs traits. Sa main gauche durant ce temps alla se poser, quoique avec peine et lenteur, sur celle de son ami iroquois. Une fois désaltéré Charlot éleva encore la voix.

— Kiné, qui va me conduire loin d’ici ?

— Lis-en-Fleur.

— Et toi ?

— Je reste au bourg pour qu’on ne vous poursuive pas, ou, du moins, pour tenter qu’on vous recherche du côté opposé à celui que vous aurez pris.

— Kiné, mon cœur souffre à la pensée de te quitter.

— L’Algonquine que mon frère aime saura bien le consoler de mon absence, reprit Kiné, avec un peu d’amertume !

— Pourquoi parles-tu ainsi, Kiné ? Crois-tu donc mon cœur si petit que deux affections grandes, nobles et aussi vives l’une que l’autre n’y puissent prendre place ! Tu ne me réponds pas ?… Oh ! Kiné !

— Ma race est silencieuse quand la douleur l’accable.

— Kiné, qu’il y a donc un côté pénible dans ma vie ! Je fais souffrir sans cesse ceux