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et d’un choc nostalgique terrible en son intensité.

Stoïque, il s’approcha du feu de sapin dont quelques aiguillettes rougeoyaient encore et fit flamber la lettre de Perrine. Il était vraiment trop dangereux pour lui et pour Kiné de garder ces pages couvertes d’écriture… Les Agniers pourraient y voir je ne sais quel message d’un malin esprit… Avec mélancolie Charlot considérait les mots tendres de Perrine, qui s’éclairaient avant de retomber en cendres. « Sois patient, sois circonspect »… Ces recommandations, à un moment, s’illuminèrent de telle sorte que Charlot se prit à sourire, les yeux de nouveau noyés de larmes. Cela lui sembla ainsi que l’adjuration suprême de Perrine à laquelle il devait coûte que coûte obéir…

Kinaetenon entra au moment où les feuilles de la tendre petite lettre se tordaient une dernière fois. Il regarda Charlot, puis approuva du geste et de la voix.

« Mon frère est sage. Sa tête a commandé à son cœur. Il est un homme, un brave sagamo.

— Kiné, mon ami, je suis à la fois combien heureux et malheureux. Assieds-toi. Ici, près de moi. Je veux parler à vois basse. Tu vas tout connaître de ce qui se passe là bas… J’ai une telle confiance en ton âme droite, Kiné, vois-tu…