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de parler ainsi de lui, questionner adroitement toutes ces personnes et apprendre quelques nouvelles concernant l’Algonquine.

Cinq longs jours se passèrent ainsi. Enfin, Charlot, le sixième jour, pria le Père Ragueneau de bien vouloir le recevoir privément. Il avait à lui faire de graves confidences. Et cela pressait. Le Père acquiesça aussitôt. L’entretien se prolongea entre le jeune soldat au cœur désespéré et le vaillant missionnaire, plein de sagesse et de pénétration. Charlot apprit presque tout ce qu’il lui importait de savoir.

Oui, deux Hurons accompagnés d’une Algonquine aux yeux noirs bien tristes, un peu absents, étaient entrés, un soir orageux du mois de mars dernier, dans la Maison de Sainte-Marie. Ces Hurons comptaient des parents dans les bourgs voisins. On s’en était donc allé bien vite les retrouver.

« Mais la jeune fille, Père, n’a pas cherché à se confier à vous… Sa mélancolie ne vous a pas non plus semblé chose si pitoyable qu’il fallût y apporter quelque baume… Hélas ! hélas ! ma pauvre Lis-en-Fleur !

— Charlot, vous pensez bien que la plus élémentaire délicatesse m’interdisait toute question trop directe. Les Sauvages, vous le savez, ont le cœur fier ; ils souffrent toujours en silence…

— C’est vrai.

— Et puis, l’un des Hurons me l’avait présentée comme sa future femme. Aucune protestation n’était venue sur les lèvres de la jeune