Page:Daveluy - À l'école des héros, 1931.djvu/22

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Charlot, qui avait le prétexte de la fatigue, put cheminer seul avec lui, en arrière de tous.

Le crépuscule descendait, rapide. Son ombre subtile enveloppait, envahissait en maître la forêt bruissante et chantante. Enfin on reprit la route de la grève, et bientôt le Fort se découpa sur les vertes futaies du bois, large tache grise, froide, un peu hostile. Mais derrière ces murs, on le savait, une vigilance incessante rôdait et flairait le danger. Cela suffisait, les regards s’émouvaient, s’attachaient avec persistance sur la dure enceinte protectrice.

À quelque cent pas du Fort on vit venir deux soldats, au pas de course. L’un n’était autre que l’ordonnance même du Commandant La Poterie, du gouverneur des Trois-Rivières.

Perrine se désola. « Marie, souffla-t-elle à l’oreille de sa compagne, vois, nous avons causé beaucoup d’inquiétude à la maison. L’ordonnance de ton père vient lui-même à notre rencontre.

— Bah ! comme c’est une œuvre de grande miséricorde qui nous a retardés, tout s’expliquera à notre avantage. »

La jeune fille courut tout de même au devant des Soldats. Ils s’arrêtèrent respectueusement à sa vue, la main au front. Elle leur rendit, avec sa gracieuse drôlerie, le classique salut militaire qui lui plaisait toujours beaucoup.