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suis noyé, noyé jusqu’au râle, jusqu’à la syncope. J’ai connu la minute où l’on meurt, ce dernier regard où tout tient, qui ramasse la vie comme dans un coup d’épervier, toute la vie, l’immense et le menu, le frisson de l’arbuste au soleil sur la rive en face qui monte, monte aux yeux qui s’enfoncent ; et mille choses du passé perdues et lointaines, visages, endroits, sonorités, parfums, qui vous assaillent toutes ensemble. Cette minute d’angoisse suprême, je la revécus devant ma lettre ouverte. Comment était-elle là ? Lui, là-haut, qu’avait-il pensé en la lisant, en retrouvant au clair de mon écriture les ca-