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Un mois plus tard j’ai appris que Viardot était mort et Tourguéneff agonisant. Je ne puis croire à cette agonie. Il doit y avoir pour les belles et souveraines intelligences, tant qu’elles n’ont pas tout dit, un sursis de vie. Le temps et la douceur de Bougival nous rendront Tourguéneff, mais ce sera fini pour lui de ces réunions intimes où il était si heureux de venir.

Ah ! Le dîner de Flaubert. Nous l’avons recommencé l’autre jour : nous n’étions plus que trois[1]


Pendant que je corrige l’épreuve de cet article paru il y a quelques années, on m’apporte un livre de « souvenirs » où Tourguéneff, du fond de la tombe, m’éreinte de la belle manière. Comme écrivain, je suis au-dessous de tout ; comme homme, le dernier des hommes. Et mes amis le savent bien, et ils en racontent de belles sur mon

  1. Écrit en 1880 pour le Century Magazine de New-York.