Page:Daudet - Trente ans de Paris, Flammarion, 1889.djvu/355

Cette page a été validée par deux contributeurs.

venait clopin-clopant à nos dîners. Depuis, j’en ai rabattu.

Hélas ! La mort dont on parlait toujours arriva. Elle nous prit Flaubert. Il était l’âme, le lien. Lui disparu, la vie changea, et l’on ne se rencontra plus que de loin en loin, personne ne se sentant le courage de reprendre les réunions interrompues par le deuil.

Après des mois, Tourguéneff essaya de nous réunir. La place de Flaubert devait rester marquée à notre table, mais sa grosse voix et son grand rire nous manquaient trop, ce n’était plus les dîners d’autrefois. Depuis j’ai retrouvé le romancier russe à une soirée chez Mme Adam. Il avait amené le grand-duc Constantin qui, traversant Paris, désirait voir quelques célébrités du jour, un musée Tussaud attablé et vivant. Tourguéneff était triste et malade. Cruelle goutte ! Elle le couchait à plat pour des semaines, et il demandait aux amis de le visiter.

Il y a deux mois que je l’ai vu pour la dernière fois. Toujours la maison pleine de