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cuirassier, avec des moustaches blondes. C’était la cohorte des Rouennais, les lieutenants de Bouilhet, qui applaudissaient à la baguette aux premières représentations.

Puis Amédée Rolland, Jean Duboys, Bataille, trio plus jeune, entreprenant, hardi, cherchant à se glisser, lui aussi, par la petite porte, comme la queue du vaste manteau de Tisserand.

Tous trois sont morts comme Bouilhet au début même de leur carrière littéraire, et c’est pourquoi les galeries de l’Odéon, quand je m’y promène au crépuscule, me semblent aujourd’hui peuplées d’ombres amies.

Cependant, ayant achevé un petit volume de poésies, je fis le tour des éditeurs ; je frappai à la porte de Michel Lévy, de Hachette ; où n’allai-je pas ? Je me faufilai dans toutes les grandes librairies, vastes comme des cathédrales, où mes bottines criaient terriblement et malgré les tapis faisaient un bruit affreux. Des employés à mines bureaucratiques m’examinaient d’un air important et froid.