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En général, les gens de lettres ont la musique en horreur. On connaît l’opinion de Gautier sur « le plus désagréable de tous les bruits » ; Leconte de Lisle, Banville, la partagent. Dès qu’on ouvre un piano, Goncourt fronce le nez. Zola se souvient vaguement d’avoir joué de quelque chose dans sa jeunesse ; il ne sait plus bien ce que c’était. Le bon Flaubert, lui, se prétendait grand musicien ; mais c’était pour plaire à Tourguéneff qui, dans le fond, n’a jamais aimé que la musique qu’on faisait chez les Viardot. Moi, je les aime toutes, en toqué, la savante, la naїve, celle de Beethoven, Gluck et Chopin, Massenet et Saint-Saëns, la bamboula, le Faust de Gounod et celui de Berlioz, les chants populaires, les orgues ambulants, le tambourin, même les cloches. Musique qui danse et musique qui rêve, toutes me parlent, me donnent une sensation. La mélopée