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allant au marché et cirant les bottes en expliquant l’Epitome.

Du drame vivant et réel j’ai gardé en somme le personnage principal, les grands traits de sa vie et sa mort si cruelle. La mère, que je n’ai pas connue, je la donne telle que je l’ai devinée à travers les récits de son enfant. Vrai encore et comme la vérité, l’excellent docteur Rivals, un héros, un saint qui court depuis trente ans les routes familières à Jack et à son romancier. De peur de l’affliger, de gêner sa grande modestie, je n’ose donner ici son nom, que tout un peuple de paysans bénit depuis deux générations ; qu’il me pardonne d’avoir, dans l’affabulation de mon livre, mêlé à sa noble existence, si droite et ouverte, un drame sinistre tiré d’ailleurs[1]. J’allais oublier deux autres témoins de la grande misère de Raoul, la femme du garde qui habite encore l’humble maison forestière où le pauvre petit trouva plus d’une fois place au feu et à la table, et

  1. Il est mort aujourd’hui, il s’appelait le docteur Rouffy ; son buste décore la jolie place verte du village de Draveil.