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les murs de théâtres ! Et la cérémonie de la lecture aux acteurs, la carafe et le verre d’eau, le manuscrit brillant sous la lampe ? Et les répétitions, au foyer d’abord, autour de la haute cheminée, puis sur la scène, la scène aux profondeurs insondables, mystérieuse, tout encombrée de charpentes et de décors en face de la salle vide, sonore comme un caveau et glaciale à voir, avec son grand lustre voilé, et ses loges, et ses avant-scènes, ses fauteuils recouverts de housses en lustrine grise ? Après, ce serait la première représentation, la façade du théâtre versant sur la place l’éclat joyeux de ses cordons de gaz, les voitures qui arrivent, la foule au contrôle, l’attente anxieuse dans un café, en face, tout seul avec un fidèle ami, et le grand coup d’émotion frappant sur le cœur comme sur un timbre, à l’heure où les silhouettes en habit noir, très animées, se détachant sur la glace sans tain du foyer, annoncent que la toile tombe, et qu’au milieu des applaudissements ou des huées le nom de l’auteur vient d’être proclamé. — « Allons ! dit l’ami, du cou-