Page:Daudet - Trente ans de Paris, Flammarion, 1889.djvu/113

Cette page a été validée par deux contributeurs.

et de petites calomnies sentant le rance, sur ces Parnasses en carton où aucune source ne court, où aucun oiseau ne chante, où le laurier poétique a la couleur du rond de cuir vert d’un chef de bureau ! Et dire que je les ai gravis, moi aussi, ces parnasses ! Il faut tout voir dans sa jeunesse ! Cela dura tant que dura mon habit.

Pauvre cher habit, quels étroits corridors n’a-t-il pas à cette époque frôlés de ses pans, quelles rampes d’escalier n’a-t-il pas fait reluire de ses manches ? Je me souviens l’avoir promené encore dans le salon de Mme la comtesse Chodsko. La comtesse avait pour mari un bon vieux savant qu’on voyait peu et qui ne comptait guère. Elle avait dû être fort belle ; c’était maintenant une grande femme droite et sèche, à l’air dominateur et presque méchant. Murger, disait-on, très impressionné d’elle, l’avait peinte dans sa Madame Olympe. Murger, en effet, avait un moment entrepris un voyage dans le grand monde, et c’est ce grand monde-là que, naїvement, il avait découvert. Grand monde logé vraiment à