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les reproductions (faites, ô ironie ! par E. Benassit, le plus cruellement sceptique des peintres) dans une manière d’autobiographie : Mon salon, par Mme Ancelot, chez Dentu. Chaque fidèle a là-dedans sa figurine, et je crois que la mienne s’y trouve, un peu dans le fond.

Ce personnel quelque peu hétérogène se réunissait ainsi chaque mardi rue Saint-Guillaume. On arrivait tard, et voici pourquoi : Rue du Cherche-Midi, à deux pas, planté là tout exprès comme une protestation permanente, existait un salon rival, le salon de Mme Mélanie Waldor. Les deux Muses avaient été autrefois liées ; Mme Ancelot avait même un peu lancé Mélanie. Puis un jour, Mélanie s’était dégagée, avait dressé autel contre autel : l’aventure de Mme du Deffand avec Mlle de Lespinasse. Mélanie Waldor écrivait ; on a connu d’elle des romans, des vers, une pièce : la Tirelire de Jeannette ! Alfred de Musset, dans un jour de cruelle humeur, a fait sur elle des vers terribles et superbes, mélange pimenté d’Arétin et de Juvénal, qui porteront