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balthazar.

Oh ! oui, il nous en fallu, du courage ; que de fois, en menant mes bêtes, je voyais la fumée de votre maison qui avait l’air de me faire signe : Viens !… elle est là !…

mère renaud.

Et moi, quand j’entendais crier tes chiens et que je te reconnaissais de loin avec ta grande cape, il m’en fallait, de la force, pour ne pas courir vers toi. Enfin, maintenant, notre peine est terminée et nous pouvons nous regarder en face sans rougir… Balthazar…

balthazar.

Renaude !

mère renaud.

Est-ce que tu n’aurais pas de honte à m’embrasser, toute vieille et crevassée par le temps, comme je suis là…

balthazar.

Oh !

mère renaud.

Eh bien ! alors, serre-moi bien fort sur ton cœur, mon brave homme. Voilà cinquante ans que je te le dois, ce baiser d’amitié. (Ils s’embrassent longuement.)

frédéri.

C’est beau, le devoir. (Serrant le bras de Vivette.) Vivette, je t’aime…