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ambroix

C’est vrai, c’est vrai. Le vent est aux souvenirs, et cela trouble un peu la cervelle. (Il s’assied.) Gertrude, ma mie, vous seriez la meilleure et la plus charmante, si vous renonciez à vos vêpres pour une fois, hein ? qu’en dites-vous ? Vous vous mettriez ici, en face de moi, un tapis vert sur la table, quelques cartes à côté de nous, le tout pour avoir des prétextes à conversation, et nous entamerions un piquet de quatre ou cinq heures qui nous conduirait jusqu’au diner par des chemins charmants… Vous verriez.

madame ambroix

Oh ! Ambroix, me faire manquer les vêpres !

ambroix

Si Léopold était là, croyez-vous qu’il vous raillerait joliment là-dessus !… Vous en disait-il assez, quand vos crises pieuses vous prenaient ; encore, de son temps, n’était-ce que par accès et non pas à l’état chronique comme aujourd’hui… Oh ! je ne vous en fais pas de reproches. En redoublant de piété vous avez, s’il est possible, redoublé de soins et d’affection pour moi… Allez à vêpres, grande fanatique !

madame ambroix, défaisant à moitié les brides de son chapeau.

Pourtant, il me semble que le bon Dieu ni monsieur le curé ne m’en voudraient pour une fois, n’est-ce pas ?