à la maison, pleurant dans un coin au milieu de tes joujoux ? « Maman est sortie pour toujours, » disais-tu à travers tes larmes, et moi, je souriais quoique un peu inquiet. Tu avais raison, ta mère était sortie pour toujours… partie avec un noble, un de ces hommes qui n’avaient qu’à naître pour être heureux et qui, leur part de bonheur épuisée, faisaient main basse sur le bonheur des autres. Oh ! la maison déserte, les repas silencieux autour de la petite table devenue trop grande, les robes de fillette qu’il fallait acheter moi-même. Oh ! les longues nuits sans sommeil, les longues journées sans travail, les larmes de douleur eflacées par des larmes de rage ! J’ai beau fermer les yeux, ne pas vouloir, je revois tout, je me souviens de tout.
Pauvre père !
Je n’ai pas pu me venger ; les coupables se sont enfuis et sont morts loin de moi ; mais aussi quels transports, quand notre heure à nous est venue ! Il me semblait que c’était pour moi que ce peuple se soulevait et que toute une race mourait pour expier mon déshonneur.
Prends garde, père ; tu laisses la haine te remplir le coeur ; elle en chassera ton enfant, tu verras.
Non, ma fille, non ! tu as toujours ta place la, et la plus grande, quoi que j’en dise… C’est mon amour pour toi qui me rattache à la vie, tu le sais