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deux. On a parlé de danser un branle, et on le dansera malgré la pluie. Ah dame ! oui dame !… Bientôt toute cette jeunesse s’installe à droite et à gauche dans les salles basses des cabarets. Les uns dansent au son des binious, les autres au « son des bouches », comme ils disent par ici. Les planchers tremblent, les lampions sont épaissis de poussière, et le même refrain lent et mélancolique retentit partout lourdement. Pendant ce temps, les voitures, les carrioles s’écoulent par les cinq portes de la ville. Les vieux manoirs se referment, et les broussailles fleuries qui garnissent les remparts semblent dans la nuit grandir, se rejoindre, se confondre, comme sous la baguette des fées les buissons enchantés qui entouraient le château de la Belle au bois dormant.