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lit. Pourquoi faire, un berceau ? Ces bourgeois vraiment ont des idées, des exigences ! Ne vaudrait-il pas mieux l’avoir là, tout près, et lui donner le sein sans se réveiller ni avoir froid, quand il crie ? Il est vrai que parfois en se retournant on l’étouffe ; mais ces sortes d’accidents sont rares.

Et puis des traditions de campagne assurent qu’un enfant de lait ça mange de tout, qu’on peut impunément le bourrer de poires acides et de prunes vertes. Arrive une inflammation, on court au médecin et l’enfant meurt. D’autres fois encore pour une chute, pour un coup non avoués, ce sont les convulsions ou la méningite… Ah ! comme nos Parisiennes feraient mieux de suivre les conseils de Jean-Jacques et de nourrir leurs enfants elles-mêmes ! Il est vrai que ce n’est pas facile toujours ni pour toutes, dans cet air anémiant des grandes villes qui fait tant de mères sans lait.

Mais que penser des bourgeoises provinciales qui, sans nécessité, par pure habitude d’insouciance et de paresse, envoient leurs enfants en nourrice pour deux ou trois ans