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qu’on ne pense qu’à lui, que de bonheurs, de bizarres coïncidences, de rencontres miraculeuses ! J’ai dit la petite lettre de Blanc Saint-Bonnet. Un autre jour c’était le procès intenté par le duc de Madrid contre Boët, son aide de camp, les bijoux engagés, la Toison d’or vendue ; puis une adjudication au Tattershall, les voitures de gala du duc de Brunswick achetées par l’Hippodrome ; ensuite, à la salle Drouot, la vente de deux couronnes montées appartenant à la reine Isabelle. Et c’est le jour où j’étais allé à « l’Hôtel » pour suivre cette vente, qu’un highlifeur, idiot superbe, avançant sa tête entre deux épaules d’Auvergnats, me criait dans la bousculade : « Où fait-on la fête ce soir ? » Un mot bête que j’ai lancé et qui a eu la fortune de tous les mots bêtes. Une autre fois je voyais passer devant la Librairie nouvelle l’enterrement du vieux roi de Hanovre, conduit par le prince de Galles. Belle page à écrire, ce convoi royal en exil. Malheureusement j’étais gêné par les enterrements de mes livres précédents. Mora, Désirée, le petit roi Madou-Ghezo. Mais tout cela m’assurait que je faisais un