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fut Fanny Legrand qui s’installa près de son lit, ne le quittant de dix jours, le soignant sans fatigue, sans peur ni dégoût, adroite comme une sœur de garde, avec des câlineries tendres, qui parfois, aux heures de fièvre, le reportaient à une grosse maladie d’enfance, lui faisaient appeler sa tante Divonne, dire « merci, Divonne », quand il sentait les mains de Fanny sur la moiteur de son front.

— Ce n’est pas Divonne… c’est moi… je te veille…

Elle le sauvait des soins mercenaires, des feux éteints maladroitement, des tisanes fabriquées dans une loge de concierge ; et Jean n’en revenait pas de ce qu’il y avait d’alerte, d’ingénieux, d’expéditif, dans ces mains d’indolence et de volupté. La nuit elle dormait deux heures sur le divan, – un divan d’hôtel du Quartier, moelleux comme la planche d’un poste de police.

— Mais, ma pauvre Fanny, tu ne vas donc jamais chez toi ?… lui demandait-il un jour… Je suis mieux à présent… Il faudrait rassurer Machaume.