Page:Daudet - Sapho, 1884.djvu/42

Cette page n’a pas encore été corrigée

mains :

— Voyons… pourquoi le chasses-tu ?…

— Je n’en veux plus… Je ne l’aime pas.

— Pourtant c’était ton amant… Il t’a fait ce luxe où tu vis, où tu as toujours vécu, qui t’est nécessaire.

— M’ami, dit-elle avec son accent de franchise, quand je ne te connaissais pas, je trouvais tout cela très bien… Maintenant c’est une fatigue, une honte ; j’en avais le cœur qui me levait… Oh ! je sais, tu vas me dire que toi ce n’est pas sérieux, que tu ne m’aimes pas… Mais ça, j’en fais mon affaire… Que tu le veuilles ou non, je te forcerai bien de m’aimer.

Il ne répondit pas, convint d’un rendez-vous pour le lendemain, et se sauva, laissant quelques louis à Machaume, le fond de sa bourse d’étudiant, en paiement de la terrine. Pour lui, c’était fini maintenant. De quel droit troubler cette existence de femme, et que pouvait-il lui offrir en échange de ce qu’il lui faisait perdre ?

Il lui écrivit cela, le jour même, aussi doucement, aussi sincèrement qu’il put, mais sans lui avouer que de leur liaison, de ce caprice