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bois presque autant qu’à Chaville, moins la promiscuité et la trompe des Hettéma. Il ne venait jamais de monde ; une fois pourtant Gaussin et sa maîtresse, arrivant pour dîner, entendirent dès l’entrée l’animation de plusieurs voix. Le jour baissait, on prenait le raki dans la serre, et la discussion semblait vive :

— Et moi je trouve que cinq ans de Mazas, le nom perdu, la vie détruite, c’est assez payer cher un coup de passion et de folie… Je signerai votre pétition, Déchelette.

— C’est Caoudal… dit Fanny tout bas, en tressaillant.

Quelqu’un répondait avec la sécheresse cassante d’un refus :

— Moi, je ne signe rien, n’acceptant aucune solidarité avec ce drôle…

— La Gournerie, maintenant…

Et Fanny, serrée contre son amant, murmurait :

— Allons-nous-en, si ça t’ennuie de les voir…

— Pourquoi donc ! mais pas du tout…

En réalité, il ne se rendait pas bien compte de l’impression qu’il aurait à se trouver en face de ces hommes, mais il ne voulait pas reculer devant l’épreuve, désireux peut-être de savoir