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sa fille, décidément très nerveuse, ce matin-là :

— Ne te lève donc pas à toute minute, c’est fatigant.

Avec la même voix descendue de deux tons dans le charabia, la mère répondit :

— Vous dévorez, bos otros… pourquoi tu veux pas qu’il mange, loui ?

— Sors de table, ou tiens-toi tranquille… tu nous embêtes…

La vieille se rebiffa, et toutes deux commencèrent à s’injurier en dévotes espagnoles, mêlant le démon et l’enfer à des invectives de trottoir :

« Hija del demonio.

Cuerno de satanas.

Puta !…

Mi madre !

Jean les regardait épouvanté, tandis que les autres convives, habitués à ces scènes de famille, continuaient de manger tranquillement. De Potter seul intervint par égard pour l’étranger :

— Ne vous disputez donc pas, voyons.

Mais Rosa, furieuse, se retourna contre lui :