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LE TRÉSOR d’ARLATAN

Naïs, à demi rassurée, demanda encore :

« Vous n’étiez donc pas dehors depuis longtemps ?

— Hé ! non… Mais pourquoi toutes ces questions ?

— Elle ne vous le dira pas, fit Charlon, qui, dans son allégresse, continuait à bourrer la cheminée de ceps de vigne, au risque de l’enflammer jusqu’au faîte… Mais moi, tant pis ! je ne peux pas me tenir, je suis trop content… Figurez-vous que depuis une quinzaine, depuis que l’enfant nous est revenue, notre maison où l’on s’aimait tant est devenue un enfer. Les femmes se carcagnent à la journée, Naïs et la grand’mère tout le temps à faire pleurer la petite à cause de son bon jour. Et, pour finir, voilà Mamette qui l’accuse d’avoir passé toute son après-midi du dimanche… devinez où ? Chez Arlatan… Zia chez Arlatan, je vous demande un peu… Pourquoi faire ? Il y a longtemps que le beau brun ne tire plus les alouettes et qu’il a renoncé au femelan pour ne s’occuper que de pharmacie… N’empêche que Naïs était d’une colère à croire qu’elle allait piquer une attaque comme l’autre fois… Heureusement que vos bonnes paroles l’ont calmée… Què, Naïs ? »

Toujours accroupi devant le feu, il la tirait doucement par sa guimpe bleu de roi ; mais, sans plus s’occuper de lui que de Miracle qu’on