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LE TRÉSOR d’ARLATAN

et s’en allaient de mas en mas, autant pour se renseigner que pour mettre le monde en garde.

Seul à pied parmi ces cavaliers bottés jusqu’aux cuisses et le trident sur l’épaule, un homme encapé d’une longue roulière agitait une torche de résine enflammée et disait d’une voix de commandement :

« Je vous répète qu’à l’espère de six heures il était au milieu du grand Clar.

— C’est de moi que vous parlez, maître Arlatan ? demanda en se montrant sur la porte le Franciot qui, à cette haute taille, à ce ton déterminé, reconnaissait son gardien des bords du Vacarès… Ce soir, en effet, je tenais l’affût vers cette heure-là.

— Je parlais du Romain, mon camarade, et de vous pareillement, si vous voulez… car vous n’étiez pas à quatre empans de la bête.

— Diantre ! fit Danjou en riant, vous auriez bien dû m’avertir. C’est vrai, maintenant je me rappelle, à quelques pas de moi, cette forme brune, immobile…

— La blonde que voici doit vous agrader mieux comme société ? » dit le gardien avançant sa belle barbe syriaque par la porte entrebâillée.

Il venait de voir Zia toute blanche sous la lampe, son fichu ouvert, l’or de ses cheveux répandu, et lui glissa d’un ton de blague égrillarde :