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ROSE ET NINETTE

« Que penserais-tu d’habiter Versailles tous les trois ? La nomination de Gaston Rémory n’est, paraît-il, qu’une affaire de semaines, le temps de vous marier et de louer, non loin du parc, un délicieux hôtel, deux étages entre cour et jardin. Je m’installe au second, vous au premier, chacun chez soi, cuisine à part, avec faculté de manger ensemble dans la grande salle du bas. Vois-tu l’heureuse vie pour moi ? Ma fille, là, tout près ; entendre son pas, son rire, racheter tant de mauvais jours passés loin d’elle. Et pour vous ce serait si commode !

« Pas gênant, le pauvre père. On veut l’avoir, toc toc au plafond ; il se sent de trop, vite il remonte. Et, quand bébé viendra, quel agrément, les soirs où vous voudrez sortir ! Qui garde et surveille la maison, l’enfant, les gens ? Grand-père… Et pendant ce temps, loin des gêneurs, des emprunteurs, loin des acteurs en quémande d’un rôle, des directeurs qui hâtent et enfièvrent l’œuvre en train, l’heureux grand-père travaille dans le silence, dans la sécurité, pour gagner la dot de Ninette. Non, je n’aurais jamais eu tant de joie et, connaissant ton cœur de brave fille, je crois que tu serais heureuse par contre-coup. »

À la lettre de son père, courrier par courrier, Rose de Fagan répondait :

« Nous avons été bien ravies, mon cher